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Demain, avant la malbouffe, avant peut-être le malamour chanté par Barbara Pravi, se glissera probablement le terme de maladaptation dans nos dictionnaires.
Aujourd’hui, nous en sommes encore loin : le terme est relativement inconnu en dehors des milieux gravitant autour du climat. Plus problématique : un grand nombre d’acteurs chargés de projets d’adaptation au changement climatique sont encore loin d’y prêter une attention suffisante, que ces projets soient menés dans des pays développés ou en développement.
Le GIEC a mis en lumière cette notion dans son dernier rapport (volet n°2, chapitre 17), en parlant « de preuves grandissantes » de maladaptation « dans de nombreux secteurs et régions du monde », ce qui a permis d’attirer un peu d’attention sur cette question dans certains médias anglosaxons, mais aussi en France où un court article sur le sujet a par exemple été réalisé par l’AFP et diffusé par certains médias en ligne. « C'est la première fois que nous avions suffisamment d’éléments pour évaluer la maladaptation de manière complète dans un rapport du GIEC » écrit l’une des co-auteures du rapport.
Mais le concept reste encore largement méconnu (bien que le GIEC en parlait déjà dans son rapport de…2001) alors qu’il est capital : il s’agit non seulement déjà d’une réalité, mais, surtout, ce problème risque malheureusement de s’accroître. Il me semble donc utile d’y consacrer un numéro.
De quoi parle-t-on ?
La maladaptation se produit quand des stratégies d’adaptation au changement climatique produisent des effets néfastes et indésirés pour certaines populations et/ou leur environnement – en particulier quand elles rendent des populations plus vulnérables au changement climatique suite à leur mise en place.
Des définitions plus précises ont été proposées par des chercheurs, comme celle-ci : « La maladaptation est le résultat d'une politique ou d'une mesure d'adaptation intentionnelle, qui augmente directement la vulnérabilité des acteurs ciblés et/ou d’autres acteurs, et/ou qui érode les conditions nécessaires à un développement durable ».
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Un exemple simple
Prenons ici l’exemple de l’utilisation de la climatisation en période de canicules.
Deux problèmes (au moins) peuvent être mentionnés s’agissant de la climatisation :
-Les climatiseurs, dont il existe plus d’1,6 milliard dans le monde et dont les ventes vont exploser, nécessitent souvent une très forte consommation d’électricité pour fonctionner. Selon l’AIE, l’utilisation de climatiseurs et de ventilateurs électriques représente déjà près d’1/5e de l’électricité totale des bâtiments dans le monde, soit 10% de la consommation mondiale d’électricité.
Le premier problème ici est l’aggravation du changement climatique causé par ces climatiseurs (« l’angle mort » du débat énergétique actuel, pour le directeur de l’AIE), via un cercle vicieux : plus le changement climatique sera important, plus les épisodes de canicules seront nombreux et intenses, plus la climatisation risque d’être utilisée pour faire face à cette chaleur, ce qui risque d’entraîner plus d’émissions de gaz à effet de serre (l’électricité dans les pays en question étant rarement décarbonée), renforçant ainsi le changement climatique.
-Mais la climatisation peut aussi renforcer la vulnérabilité aux canicules. Et ce pour deux raisons, exposées par le chercheur Vincent Viguié : d’une part, « la climatisation rejette de l’air chaud à l’extérieur, augmentant les températures et aggravant les canicules pour les personnes qui ne peuvent ou ne veulent pas utiliser de climatisation ». D’autre part, « compter principalement sur la climatisation pour limiter les impacts d’une canicule signifie que toute coupure de courant engendrera d’importants effets sanitaires. C’est ce que l’on a pu observer aux Etats-Unis, à l’été 2021 par exemple, où le pic de demande de climatisation et les difficultés à produire de l’électricité lorsqu’il fait chaud ont engendré de nombreuses coupures ».
Plus globalement, miser principalement sur la climatisation pour affronter des canicules revient à moins investir pour explorer des pistes d’adaptation plus structurelles et résilientes.
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L’exemple des climatiseurs est simple à comprendre mais n’est pas représentatif de la diversité des cas possibles. Nous allons en voir plusieurs dans cet article, mais voici déjà deux cas de figure assez différents :
- L’environnement lui-même peut se retrouver dégradé suite une action d’adaptation. Le chercheur Vincent Viguié cite plusieurs exemples dans un article paru dans les Annales des Mines : « L’utilisation de canons à neige pour faire face à la diminution de l’enneigement nécessite une grande quantité d’eau et peut ainsi mettre en péril la ressource en eau au plan local.
Il en va de même d’ailleurs pour l’utilisation de la végétation pour maintenir des températures fraîches en ville en périodes de canicule : une végétation qui souffre d’un déficit d’eau (n’étant plus arrosée) perd quasiment tout son pouvoir rafraîchissant.
Dans d’autres domaines, la construction de digues pour contrer la montée du niveau de la mer peut nuire aux écosystèmes côtiers, tout comme l’utilisation de produits phytosanitaires pour faire face aux nouvelles espèces invasives peut nuire aux sols et à certains écosystèmes continentaux. »
Notons que la dégradation de l’environnement peut venir ensuite fragiliser des populations locales qui y dépendent (pour leurs activités économiques, leur sécurité alimentaire, etc.) et les rendre donc plus vulnérables aux effets à venir du changement climatique.
- La maladaptation peut aussi se produire quand des opportunités de revenus pour (sur)vivre se tarissent suite la mise en place d’actions d’adaptation. Soit directement, soit indirectement, comme à plus long terme. Par exemple, une stratégie d’adaptation peut encourager des agriculteurs à vendre leurs terres et à devenir employés d’un autre secteur tout aussi vulnérable au changement climatique mais qui offre plus de sécurité économique à court terme. Cette stratégie peut relever de maladaptation si elle laisse ces agriculteurs sans possibilité de revenir à l’agriculture et que leur nouveau secteur d’activité devient ensuite fragilisé avec des destructions d’emplois à la clef.
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« Le fait que les auteurs du rapport du GIEC aient trouvé tant d'exemples de tentatives d'adaptation qui détruisent la nature, mettent la vie de gens en danger ou augmentent les émissions de gaz à effet de serre, c'est….😬. C’est exaspérant que tant de temps et d'argent aient été gaspillés sur des conneries. Ceci dit je trouve encourageant que le GIEC l'ait compris et ait traité assez rapidement le problème comme il se doit » - Amy Westervelt, journaliste américaine spécialisée sur les questions environnementales
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Trois types de maladaptation (avec exemples pour chacun)
Un article publié en février sur le site CarbonBrief, rédigé par plusieurs chercheurs suite à une étude dédiée, apporte plus de précisions sur les différents cas de maladaptation.
Il commence par planter le décor : « Dans la dernière décennie, de nombreuses approches d'aide au développement ont été réorientées pour fournir une « aide à l'adaptation ».
Mais notre analyse suggère que les échelles de temps visées, les participants ciblés et le but ultime des actions sont souvent confus, ce qui se traduit par des investissements bien intentionnés mais qui se retournent contre l’intention initiale et aggravent les effets du changement climatique pour de nombreuses personnes ».
S’il « est très difficile de donner de grands principes simples pour une « adaptation réussie » » (« c’est un processus de long terme, qui dépend de circonstances spécifiques »), les chercheurs commencent à savoir identifier « à quoi ressemble une mauvaise stratégie d’adaptation ».
L’étude menée par les scientifiques met en avant trois façons dont des projets d’adaptation peuvent affecter la vulnérabilité de populations :
1/ D’abord, quand des actions d’adaptation renforcent des vulnérabilités existantes, notamment en termes d’inégalités.
Exemple : « à São Tomé-et-Príncipe, une action d'adaptation financée par des acteurs extérieurs, qui visait à accroître la productivité agricole par des mesure de modernisation, n'a été proposée qu'à ceux qui possédaient des terres, ignorant les non-propriétaires. Or ceux-ci sont souvent plus vulnérables au changement climatique, justement parce que leurs moyens de subsistance sont moins garantis. C'est pourquoi l’approche d’adaptation retenue a renforcé leur marginalisation ».
Parfois même, les actions d’adaptation visant à favoriser la participation et l’inclusion des communautés locales « en viennent à renforcer, plutôt que remettre en question, les relations de pouvoir existantes ».
A Vanuatu, une étude a analysé les résultats de projets d’adaptation menés au sein de communautés villageoises ces dernières décennies. Le résultat est clair : en oubliant de traiter les inégalités systémiques et les relations de pouvoir, ces projets ont globalement échoué, après avoir engendré des divisions et des conflits au sein des communautés concernées.
« L’échelon de la “communauté”, privilégié depuis longtemps pour les projets de développement, est de plus en plus présenté comme la panacée pour l'adaptation au changement climatique ». Or c’est un problème.
« Les dynamiques sociales et les relations de pouvoir ont été à l’épicentre de l’échec du projet » à Vanuatu, peut-on lire dans l’étude. « Cet exemple souligne le besoin urgent de repenser ce qu’on entend par « communauté » pour le déploiement de projets d’adaptation, en dépassant la seule vision de l’échelle géographique. Il faut s’assurer que le contexte socio-politique sur place soit bien compris et que les projets ne renforcent pas des inégalités existantes » - au risque, à défaut, d’affaiblir la capacité réelle des populations à s’adapter.
2/ Deuxième cas de figure : quand des actions d'adaptation déplacent des vulnérabilités.
Exemple (lu ici) : « lorsque des habitants le long d’une rivière développent l'irrigation pour faire face au changement climatique et prélèvent plus d'eau de la rivière, laissant moins d'eau disponible pour d’autres habitants en aval ».
Ou encore : quand des digues destinées à protéger certains habitants contre la montée des océans augmentent la vulnérabilité des populations situées en dehors de la zone de protection de ces digues.
Dernier exemple, à partir d’un cas réel : « au Vietnam, des actions de protection des forêts et des barrages hydroélectriques destinées à réguler les inondations dans les terres inondables ont d'abord semblé bénéfiques. Cependant, en observant leurs effets plus en détails, ces actions ont réduit l'accès de populations montagnardes aux ressources foncières et forestières …conduisant à les rendre plus vulnérables aux impacts du changement climatique ».
3/ Troisième cas de figure : quand des projets d’adaptation créent de nouvelles sources de vulnérabilité – notamment en introduisant par inadvertance des risques pour le moyen et long terme.
Exemple : « le besoin urgent d'augmenter la productivité agricole dans les zones victimes de sécheresse peut conduire à privilégier l'irrigation comme solution. Cette irrigation peut apporter des avantages à court terme en assurant aux agriculteurs une récolte, mais si la fréquence des sécheresses augmente, la nappe phréatique continuera de baisser. Cela ne fera donc qu’encourager la dépendance à l'égard d'une eau qui n'est pas garantie ».
De plus, la fausse confiance que procurent ces actions peut enfermer encore davantage les populations dans des situations à risque.
-> « Dans le cas de l'irrigation, par exemple, les coûts d'investissement initiaux sont élevés, ce qui peut laisser les populations sans ressources financières pour essayer de gagner leur vie autrement quand l'eau viendra à manquer ».
-> Autre exemple : « au Bangladesh, la construction de digues (pour protéger les populations de l'élévation du niveau de la mer et d’inondations dues aux tempêtes) a créé un faux sentiment de sécurité, qui a favorisé la construction d’habitations dans des zones très inondables ». Evidemment, cette situation se retrouve(ra) bien ailleurs qu’au Bangladesh. Mais là-bas, sur les plaines inondables de la rivière Jamuna, les études montrent déjà que les taux de mortalité ont augmenté suite à la construction de nouvelles habitations.
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Ce qui pose problème, en résumé
Les raisons qui conduisent à de la maladaptation commencent à être bien identifiées, écrivent les auteurs de l’article de CarbonBrief. Ceux-ci listent en particulier 5 facteurs :
1- Des approches trop schématiques de l’adaptation, qui ne prennent pas en compte les inégalités. « Par exemple, les concepteurs de projets omettent parfois de tenir compte du fait que les hommes et les femmes n’ont pas forcément les mêmes expositions aux risques climatiques. Cette omission peut conduire à des inégalités (supplémentaires) entre les groupes considérés ».
Au fond, comme l’explique un autre article, on ne peut pas lutter réellement contre la maladaptation si on ne prend pas sérieusement en compte les différences de vulnérabilité entre groupes sociaux. Une étude de 2013 explique ainsi que les femmes du Bangladesh ont tendance, lorsqu’elles se font surprendre par des inondations, à moins s’échapper que les hommes vers des terrains surélevés, parce que les normes socioculturelles leur dictent de ne pas quitter leur domicile sans être accompagnées par un homme de leur entourage.
2- Peu d'évaluations des effets à long terme des projets, et peu d'analyses critiques sur les retombées potentielles sur d'autres domaines ou groupes que ceux visés.
3- Peu ou aucune participation de groupes marginalisés dans la conception et mise en place de projets d’adaptation. « Les communautés locales ne sont jamais uniformes. Certaines personnes de pouvoir peuvent retenir ou prendre le contrôle de financements de projets, avec leurs cercles d’alliés ». Autre exemple : « les membres les plus éduqués peuvent être les seuls à disposer du savoir nécessaire pour gérer la bureaucratie liée aux projets ».
Au fond, comme expliqué dans un autre article, attention aux « projets d’adaptation conduits comme des interventions techno-managériales », sans prendre en compte les contextes politiques, sociaux, culturels.
4- Certains projets d'adaptation voient leurs objectifs réajustés pour correspondre aux critères de « l'aide au développement» sans réellement prendre en compte spécifiquement les risques climatiques. Autrement dit : des projets sont parfois estampillés « projets d’adaptation » de façon trompeuse.
5- La façon de définir le « succès d’un projet d’adaptation » peut dépendre des programmes de développement dominants et des intérêts des groupes les plus puissants ou les mieux connectés. Les groupes les plus marginalisés risquent alors d’être oubliés dans la planification de l'adaptation.
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Conclusion
« Le défi de l'adaptation au changement climatique est qu'il s'agit autant d'un PROCESSUS que d'un RÉSULTAT. Puisque le climat ne cesse de changer, les stratégies d’adaptation elles-mêmes doivent être adaptatives » - Lisa Schipper
Que l’adaptation au changement climatique ait besoin de (bien) plus de financement n’ait pas en cause ici. Néanmoins, si le sujet de la maladaptation reste à l’avenir aussi peu pris en compte qu’aujourd’hui, « le risque est de dépenser beaucoup d’argent pour rendre en pratique les gens PLUS vulnérables au changement climatique », comme l’explique la chercheuse Lisa Schipper. Celle-ci ajoute donc que « l’adaptation est plus nécessaire que jamais, mais doit être repensée ».
Avec ses collègues, elle écrit sur le site CarbonBrief que « malgré de bonnes intentions, de nombreuses interventions d'adaptation reproduisent jusqu'à présent de vieilles erreurs et finissent par aggraver les choses ».
Leur conclusion : sur le sujet de l’adaptation au changement climatique, il ne faut pas en rester au seul débat sur la quantité de financement nécessaire. « Nous devons nous demander comment les projets d'adaptation peuvent réellement réduire la vulnérabilité - et comment ils peuvent mieux le faire, en ciblant les personnes qui en ont le plus besoin ».
La vulnérabilité : voilà le terme clef. Lisa Schipper le définit comme « le risque d’être atteint par le changement climatique » et ajoute : « ce n’est pas une caractéristique avec laquelle on naît, mais un filtre créé par des normes sociales et culturelles, et des contextes économiques, physiques et écologiques ».
Dans un article paru en 2020, elle écrit : « tant que la réduction de la vulnérabilité ne sera pas au cœur des mesures d'adaptation, le risque de maladaptation restera présent. »
Et pour cela, il est nécessaire de bien comprendre de quoi il s’agit…et ce dont il ne s’agit pas. Par exemple, la vulnérabilité n’est pas forcément équivalente à la pauvreté. « Des personnes pauvres peuvent avoir plus d’expérience des difficultés et donc être mieux capables d’activer des stratégies de survie ».
La vulnérabilité ne peut être comprise pleinement que si on se penche sur ses causes premières, « profondément ancrées ». Celles-ci « sont liées aux inégalités systémiques, souvent issues de déséquilibres et luttes de pouvoir historiques ». On retombe là encore sur la notion de rapports de pouvoir - le dénominateur commun des raisons pour lesquelles nous ne sommes pas parvenus à lutter contre le changement climatique ces dernières décennies (cf numéro dédié).
« Les constructions sociales liées à la race, l’ethnie, la pauvreté, l’appartenance politique, et le genre » peuvent « faire en sorte qu’un aléa naturel se transforme très vite en désastre pour certaines catégories de population », plus encore que pour d’autres.
La maladaptation est donc un cas d’école démontrant le besoin de faire toute leur place aux sciences sociales - et aux concepts comme celui d’intersectionnalité - dans les travaux et réflexions sur le changement climatique.
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Autres idées / références / cas concrets pour aller plus loin
-Dans son article de 2020 sur le sujet, Lisa Schipper raconte qu’« au Pérou, des femmes ont eu l’accès à du microcrédit pour démarrer leurs propres projets, dans le cadre d’actions d’adaptation. Problème : la violence domestique a fortement augmenté parce que les hommes sont devenus jaloux du succès des femmes concernées ».
Lisa Schipper écrit ensuite : « Même si ce résultat n’est pas positif, citer cet exemple comme de la maladaptation ouvre la porte à ce que tous les résultats négatifs soient considérés comme de la maladaptation : le risque est de créer de la confusion sur ce qui cause en premier lieu de la vulnérabilité au changement climatique.
Des décennies d’expérience de projets de développement ont montré la difficulté à limiter les externalités négatives. Il serait extrêmement difficile de concevoir un projet qui bénéficie à tout le monde et qui n’a aucun coût, pour personne, nulle part, bien que ce soit toujours l’objectif ».
Dans le même ordre d’idées, plus loin dans l’article : « l’incertitude sur la façon dont le changement climatique affectera les écosystèmes et les sociétés humaines signifie que chaque stratégie comporte un certain degré de risque. Au début des recherches académiques sur l'adaptation, l’objectif de stratégies d'adaptation « gagnantes-gagnantes » étaient annoncées comme des principes directeurs, mais au fil du temps, il est devenu clair que la réponse au changement climatique est complexe et qu'il est rare qu'une stratégie soit uniquement positive ».
-Un exemple frappant cité par le chercheur Vincent Viguié dans un article paru dans les Annales des Mines : une étude de 2021 (Eriksen et al.) a analysé une trentaine des projets d’adaptation financés par des bailleurs internationaux (Banque mondiale, etc.) : elle montre que chacun d’entre eux peut, d’une manière ou d’une autre, être considéré comme relevant de maladaptation…
-Un reportage (article en anglais) en Floride sur un cas typique de maladaptation : la pratique du « fill and build ». En résumé : surélever des terrains pour permettre à des promoteurs de construire et vendre des maisons dites « à l'abri des inondations » pour ceux qui en ont les moyens. Problème : les eaux de pluie qui s'écoulent des lots surélevés inondent les maisons et rues voisines, ce qui met les autres résidents, souvent présents depuis longtemps, encore plus en danger en cas d'ouragans et d’inondations... La tendance du « fill and build » se développe non seulement en Floride mais aussi dans d’autres Etats américains comme le Texas, et globalement dans des centaines de communautés côtières. « A certains endroits, cette pratique est considérée comme une stratégie d'adaptation »…
-Un podcast (en anglais) de 20mn sur le cas de Miami : comment les investissements de Miami face aux inondations pourraient mener à de la maladaptation – et ce que d’autres villes ailleurs dans le monde peuvent retenir de ce cas.
-Une étude de recherche (en anglais) sur un cas concret, dans le nord du Ghana. Elle montre que « de nombreuses mesures entreprises par des populations locales pour affronter le changement climatique produisent aujourd’hui de la maladaptation, entraînant des situations de « verrouillage » qui pourraient exacerber les vulnérabilités climatiques futures. » Au cœur du problème : les actions entreprises dans l’agriculture, pilier de l’économie ghanéenne, qui fait vivre de nombreuses familles pauvres et qui est l’un des secteurs les plus vulnérables au changement climatique. Exemple d’action de maladaptation (appliqué au contexte local) cité dans l’étude : diversifier ses moyens de subsistance avec de la vente de bois de chauffage et la production de charbon de bois.
-Je n’ai pas fait la distinction dans cet article pour rester simple, mais il faut savoir que les chercheurs distinguent « actions d’adaptation » et « stratégies d’ajustement ». La différence ? Les premières relèvent d’actions prises sur le moyen et long terme pour adapter des systèmes socio-écologiques, tandis que les secondes font référence aux mesures prises par des (groupes de) citoyens pour limiter l’impacts de variabilités climatiques sur leurs moyens d’existence, sur le court terme (sur des périodes de moins d’un an, généralement).
-Sur ce lien, des extraits du dernier rapport du GIEC concernant la maladaptation.
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C’était le 52e numéro de la newsletter Nourritures terrestres. Merci à celles et ceux qui soutiennent ce travail sur ma page Tipeee. Vous pouvez (re)lire les numéros précédents ici. Rdv en juin pour le numéro 53 ! Clément
Voir aussi la passionnante analyse du livre de James Ferguson "The Anti-Politics Machine" sur les errements de "l'aide au développement": https://astralcodexten.substack.com/p/your-book-review-the-anti-politics